Un laser pour mesurer le bruit

Une nouvelle technique de mesure par laser permet de localiser et caractériser le bruit à distance. Grand intérêt pour l'acoustique aéronautique !

Numéro 48

Pour éliminer ou réduire les émissions de bruit d'un avion, il faut d'abord les localiser (ici carte obtenue par antenne acoustique au sol en phase d'approche).
Pour éliminer ou réduire les émissions de bruit d'un avion, il faut d'abord les localiser (ici carte obtenue par antenne acoustique au sol en phase d'approche).
Lorsqu’on souhaite réduire les bruits des avions liés à l’écoulement de l’air le long de la voilure*, ou bruits aérodynamiques, il importe de connaître précisément de quels endroits ils viennent et comment ils se forment. Or, il n’est pas possible de placer des capteurs partout, à la fois pour des raisons de coût et de robustesse des capteurs. De plus, les capteurs perturbent l’écoulement de l’air, donc modifient le bruit. Quant aux mesures effectuées loin du fuselage, elles ne permettent de remonter à la source du bruit qu’en utilisant de nombreuses hypothèses, ce qui engendre des incertitudes. C’est pourquoi l’Onera développe une nouvelle technique de mesure faiblement intrusive de la « pression acoustique  » , basée sur l’utilisation de lasers : la vélocimétrie laser Doppler (LDV).

fuselage, elles ne permettent de remonter à la source du bruit qu’en utilisant de nombreuses hypothèses, ce qui engendre des incertitudes. C’est pourquoi l’Onera développe une nouvelle technique de mesure faiblement intrusive de la « pression acoustique  » , basée sur l’utilisation de lasers : la vélocimétrie laser Doppler (LDV).

La partie émission du dispositif de mesure par vélocimétrie laser 3D de la soufflerie F2 du centre Onera du Fauga-Mauzac
La partie émission du dispositif de mesure par vélocimétrie laser 3D de la soufflerie F2 du centre Onera du Fauga-Mauzac

La pression acoustique ? C’est tout simplement la responsable du bruit. Le son est en effet une onde de pression propagée dans l’air, produisant localement des phénomènes de compression et de dépression successifs. Comment un laser, c’est à dire une source lumineuse, permet-il d’avoir des informations sur le son ? De la même manière que les radars surveillent notre vitesse sur les routes : grâce à l’effet Doppler. « En pointant le laser dans la zone que nous souhaitons étudier, nous obtenons des informations sur la vitesse particulaire, c’est à dire la vitesse des molécules d’air en vibration, explique Frank Simon, ingénieur de recherche à l’Onera de Toulouse. Mais ce n’est pas suffisant pour connaître la pression acoustique, nous devons combiner ces mesures avec un modèle de propagation des ondes dans l’écoulement d’air, c'est-à-dire un modèle de propagation aéro-acoustique. »

Montage d'une source acoustique de référence et de microphones dans la soufflerie F2 de l'Onera Fauga-Mauzac pour validation de la méthodologie de mesure de pression acoustique par Vélocimétrie laser 3D.
Montage d'une source acoustique de référence et de microphones dans la soufflerie F2 de l'Onera Fauga-Mauzac pour validation de la méthodologie de mesure de pression acoustique par Vélocimétrie laser 3D.

L’intérêt de cette technique est évident : on pourrait « viser » n’importe quel point autour d'une maquette d’avion en veine de soufflerie pour y connaître la pression acoustique. « C’est comme un capteur virtuel », s’enthousiasme Frank Simon.

Bien sûr, il a fallu valider le concept. Des mesures ont ainsi été réalisées sur un banc d’essai aérodynamique destiné à la validation des logiciels de calcul aéro-acoustique. On a pu faire varier la température de l'air, la vitesse d'écoulement ainsi que le niveau de pression acoustique. « Certaines souffleries de l’Onera sont dotées de vélocimètres lasers, indique Frank Simon. On peut ainsi mesurer à la fois la vitesse des écoulements d’air et la vitesse acoustique liée au niveau sonore, ceci avec une souplesse d'utilisation inégalée. »

Cette technique permet aussi de caractériser en soufflerie de grande taille des matériaux absorbants placés sur la voilure ou dans les nacelles des moteurs.

Exemples de niveaux de pression acoustique obtenus par vélocimétrie laser 3D en présence d'un écoulement moyen de 26 m/s soit près de 95 km/h
Exemples de niveaux de pression acoustique obtenus par vélocimétrie laser 3D en présence d'un écoulement moyen de 26 m/s soit près de 95 km/h


Cécile Michaut, journaliste scientifique


Un brevet national concernant l'obtention de la pression acoustique par méthode laser a été déposé et publié récemment (Brevet n° 0957157-15 avril 2011). Le procédé développé est susceptible d'être appliqué dans les souffleries de grande dimension. La campagne d'essai menée dans la soufflerie F2 de l'Onera Fauga-Mauzac a d'ailleurs confirmé la faisabilité du procédé de mesure.

* : Voir Zoom in the lab n° 11 : Bruyants écoulements.

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