Nouveaux avions : bonnes vibrations avec l’ONERA

Depuis que l’ONERA est l’ONERA, soit depuis 1946, il mène des tests de vibrations sur les aéronefs. Et pour cause : avant le premier vol, parmi les nombreux tests que doit subir un nouveau modèle d’avion, ces essais de haute technicité sont indispensables pour démontrer qu’il ne risque pas d’être détruit du fait de vibrations. Toute la gamme Airbus est passée entre les mains des experts en aéroélasticité de l’ONERA, qui travaillent en parfaite collaboration avec le DLR sur ce sujet.

En 1946, à la fin de la guerre, des ingénieurs allemands spécialisés en vibrations rejoignaient les rangs des experts français dans ce qui allait officiellement devenir l’ONERA. Une expertise maintenue jusqu’à aujourd’hui, puisque l’ONERA a conduit notamment, depuis le premier Airbus A300B en 1972, toutes les campagnes d’essais des prototypes et premiers de série Airbus assemblés en France. Depuis 2001, les spécialistes de l’ONERA sont associés à ceux de l’Institut d’Aéroélasticité du DLR à Göttingen, pour mener conjointement toutes les campagnes d’essais de vibrations au sol des nouveaux nés d’Airbus.

Le principe des essais

Pour ce véritable check-up, test d’identification structurale, l’aéronef est secoué en tous sens avec des excitateurs répartis de manière à le faire vibrer sur ses fréquences de résonances et les étudier dans le détail. Des centaines de capteurs (accéléromètres) mesurent les réponses aux différentes excitations. Des giga-octets de données sont analysés sur site, et transmises à l’avionneur qui pourra alors recaler son modèle numérique et vérifier par simulation que l’avion ne présente aucun risque d’instabilité (flottement aéroélastique) et qu’il est effectivement prêt à voler en toute sécurité.

La modélisation, qui a progressé, reste perfectible et requiert une validation. La réglementation aérienne impose de réaliser des essais de vibrations au sol, notamment pour connaître les facultés d’amortissement et vérifier les rigidités de la structure.

Pour l’aéronautique légère, l’ONERA peut effectuer lui-même les calculs de prédiction de flottement, indispensables à la sécurisation des premiers vols et au dossier de certification. Si nécessaire, l’ONERA peut proposer au constructeur des modifications structurales pour éviter les risques de flottement.
    
Après les essais au sol, place aux essais en vol consacrés aux vibrations. A des vitesses différentes, l’avion est soumis aux vibrations déclenchées par les pilotes et ingénieurs d’essai via des dispositifs électroniques activant les différentes gouvernes. L’exploitation des réponses, de quelques dizaines d’accéléromètres embarqués, permet de vérifier que le comportement vibratoire en vol est conforme aux prédictions des simulations numériques. Une fois ces essais validés, l’avion est bon pour le service, du moins en ce qui concerne les vibrations.

Quelques exemples de campagnes sur de célèbres aéronefs

Essais de vibrations au sol de l'A380/800 (ONERA DLR) en 2005. Copyright AIRBUS
Essais de vibrations au sol de l'A380/800
(ONERA DLR) en 2005 - © AIRBUS

Pour exemple, en partenariat avec le DLR et Airbus, l’ONERA a mené les essais de vibrations au sol de l’A380 en 2005 : une campagne de très grande envergure puisque pas moins de 850 accéléromètres ont été nécessaires. Collés en différents points de l’avion, ils ont mesuré les accélérations et, par extension, les déplacements de la structure que l’on fait vibrer à l’aide d’excitateurs.

« Pour la configuration vide de carburant, configuration marginale mais très utile pour valider les modèles numériques, nous avions ainsi analysé 112 modes de vibration différents de l’avion », précise Pascal Lubrina, chargé de ces essais à l’ONERA.

 

 

2001 : essais de vibrations au sol à vocation recherche avec l’Airbus A340/600 utilisé comme « cobaye » (AIRBUS ONERA DLR) Copyright AIRBUS
2001 : essais de vibrations au sol à vocation
recherche avec l’A340/600 utilisé comme
« cobaye » (AIRBUS ONERA DLR) -
© AIRBUS

En 2011, l’ONERA a participé, toujours en collaboration avec l’Institut d’Aéroélasticité du DLR, à une campagne d’essais de grande ampleur et à vocation recherche sur un A340-600.

Cette campagne, menée dans le cadre du projet OGT (Optimized Ground vibration Tests) en étroite collaboration avec Airbus sur le site Clément Ader à Toulouse, a permis de valider l’ensemble des nouveaux moyens techniques et méthodes pour la conduite des futurs essais de vibrations au sol de grands aéronefs.

 

 

 

2013 : essais de vibrations au sol de l'Airbus A350 XWB 900 (ONERA DLR). Copyright AIRBUS
2013 : essais de vibrations au sol de
l'A350 XWB 900 (ONERA DLR) - © AIRBUS

L’expérience acquise et les nouvelles capacités techniques dont l’ONERA est maintenant doté ont permis de répondre efficacement aux spécifications des essais d’identification dynamique de l’A350-XWB-900 en 2013, dans un rythme record permettant à ce nouvel avion de se présenter en vol à l’occasion du salon du Bourget, quelques semaines à peine après son test de vibrations au sol.

 

 

 

 

Dernier essai en date

2018 : Essais de vibrations au sol de l'Airbus Beluga XL (ONERA DLR). Copyright AIRBUS
2018 : Essais de vibrations au sol de
l'Airbus Beluga XL (ONERA DLR) - © AIRBUS

Fin mai 2018, l’équipe mixte ONERA-DLR a réalisé les essais de vibrations du nouveau Beluga XL, aéronef conçu pour répondre à l’augmentation de production d'Airbus et offrir des volumes de transport plus importants.  Pour étudier le comportement structurel du nouveau cargo géant, Airbus s’est à nouveau tourné vers l’équipe ONERA-DLR, qui en est alors à son 10ème GVT (Ground Vibration Test) en 20 ans, pour et avec Airbus. Pour chacune des 2 configurations structurales testées, 8 jours de mesure au total, 120 modes de vibrations ont été identifiés, chacun de ces modes étant traqué une 20aine de fois selon les différents niveaux de force et sites d’excitation utilisés. Ces courbes exhibent les évolutions des fréquences de résonance et des coefficients d’amortissement selon les niveaux de forces introduits, attestant ainsi des caractères non linéaires des modes de vibrations.

La suite : une équipe française

En 2016, les 2 acteurs majeurs français dans ce domaine, l’ONERA et SOPEMEA, laboratoire spécialisé dans les essais fonctionnels et en environnement et habituellement sollicité pour les essais de vibrations au sol des avions Dassault, s’allient pour former le champion français de l’analyse modale des avions. A court terme, ils formeront une équipe mixte pour mener les essais de vibrations des futurs avions de Dassault. Une collaboration qui ne dépaysera pas l’ONERA, partenaire de Dassault pour l’identification structurale d’avion de chasse depuis de nombreuses années.

 

 

video-tests-vibration-100x68.jpgLes tests de vibration
en vidéo
Secoué au sol avant son envol. Avec Pascal Lubrina, Expert vibrationsEn savoir plus sur les tests de vibrations réalisés
sur l'A350, avec Pascal Lubrina, expert vibrations
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