Attention, chute de matériel spatial !

Anticiper la rentrée des débris spatiaux dans l'atmosphère est indispensable pour identifier le risque d’impact dans les zones survolées, mais aussi pour préparer – à terme – des stratégies de "nettoyage" sans risque des orbites des objets les plus gênants.

Numéro 52

Rentrée atmosphérique de l'Automated Transfer Vehicle (ATV) en vue d'artiste (source Esa). Les fragments de l'ATV sont tombés dans le Pacifique le 29 septembre 2008.

Rentrée atmosphérique de l'Automated Transfer Vehicle (ATV) en vue d'artiste (source Esa). Les fragments de l'ATV sont tombés dans le Pacifique le 29 septembre 2008.



 

Le 26 septembre 2011, un satellite de six tonnes de la NASA, UARS,  s'est écrasé sur Terre : à court de carburant, il a progressivement perdu de l’altitude (on parle d’érosion d’orbite), jusqu’à rentrer dans l’atmosphère et tomber sur Terre. Or à aucun moment, la Nasa n’a su prévoir avec précision la zone de retombée de ce satellite. Annoncé aux alentours de la Sardaigne, il a finalement terminé sa vie… dans le Pacifique !

Population des débris catalogués gravitant autour de la Terre en orbite basse et géostationnaire (source : Nasa)

Population des débris catalogués gravitant autour de la Terre en orbite basse et géostationnaire

(source : Nasa)

D’autre part, quelques 400 000 débris spatiaux de taille supérieure à un centimètre gravitent autour de la Terre. Parmi eux, on compte 18 000 objets catalogués de plus de 10 cm d’origine humaine, tels que des satellites non fonctionnels, des étages supérieurs de lanceurs et des restes d’impacts plus ou moins volontaires… Or, ces débris peuvent endommager les engins spatiaux, et générer d’autres débris par collision, avec le risque, sur le long terme, d’augmenter exponentiellement leur nombre et de rendre certaines gammes d’orbites inutilisables. Ce serait la réaction en chaîne dite syndrome de Kessler.

Création de débris lors du lancement et de la mise en orbite d'un satellite (source : Nasa).

Création de débris lors du lancement et de la mise en orbite d'un satellite (source : Nasa).

On commence donc à envisager de « nettoyer » cet espace autour de la Terre, en envoyant des « véhicules de transfert orbital » chargés de pousser ces débris vers d’autres orbites moins utiles, ou de les faire retomber sur Terre.

Les agences spatiales souhaitent aussi pouvoir contrôler la fin de vie des satellites en les équipant dès l'origine pour une désorbitation volontaire.

Rentrée atmosphérique de l'ATV Jules Verne après désorbitation et fragmentation (source Esa)

Rentrée atmosphérique de l'ATV Jules Verne après désorbitation et fragmentation (source Esa)



 

L'ONERA mène ainsi des activités scientifiques qui visent à prévoir comment les débris et les satellites rentrent dans l’atmosphère, comment ils survivent, voir leur trajectoire et quels dégâts ils peuvent engendrer. Cela pourrait sembler un problème simple de chute des corps, que l’on sait résoudre depuis Newton, mais il n’en n’est rien. « Le satellite ne descend pas droit, il passe par une série d’orbites de plus faibles altitudes, explique Jean-Luc Vérant, chercheur à l’ONERA. De plus, selon la face que le satellite présente côté Terre, selon l’ouverture ou non de ses panneaux solaires, le freinage atmosphérique est différent et la trajectoire aussi. Chaque chute de satellite est donc unique. »

Enveloppe en titane (70 kg) du moteur du troisième étage de la fusée Delta 2 après son impact au sol en Arabie Saoudite le 21 janvier 2001 (source Nasa)

Enveloppe en titane (70 kg) du moteur du troisième étage de la fusée Delta 2 après son impact au sol en Arabie Saoudite le 21 janvier 2001 (source Nasa)

L’ONERA travaille en partenariat avec le Centre national d’études spatiales (Cnes), et se focalise aujourd'hui sur les interactions entre les débris. « Le Cnes considère les morceaux du satellite séparément, rappelle le chercheur. Or, lorsque le satellite se brise, les gros morceaux se situent en dessous des petits. Un gros fragment peut donc en cacher un plus petit, qui sera alors davantage préservé. » Connaître les interactions entre fragments permettrait de mieux prévoir leur dispersion au sol, afin d’apporter les informations les plus précises sur le risque d'impact.

Simulation numérique 3D Cedre® de fragments en interaction (image Onera)

Simulation numérique 3D Cedre® de fragments en interaction (image ONERA)

 

Cécile Michaut, journaliste scientifique.

 

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