Le drone du futur copie la nature

Les hommes pourront sans doute disposer dans le futur de véritables "jumelles volantes", endurantes, discrètes, autonomes, pour aller voir sans s'exposer dans des zones à risques. Les ailes battantes ou vibrantes sont probablement une bonne solution pour atteindre les performances requises par de tels microdrones...

Numéro 6

Le projet REMANTA s'inspire de la nature pour concevoir des drones à ailes battantes
Le projet REMANTA s'inspire de la nature pour concevoir des drones à ailes battantes
Aux premiers temps de l'aviation, certains concepteurs avaient tenté d'imiter le vol des oiseaux, en fabriquant des avions aux ailes battantes. Sans succès : trop compliqués, trop fragiles, ces modèles ont très vite été remplacés par les avions à ailes fixes. Pourtant, les recherches sur les ailes battantes ne sont pas tout à fait abandonnées. Pas pour des avions, mais pour des drones de très petite taille. Les microdrones, qui ne dépassent pas 15 centimètres, doivent être très maniables, à grande comme à faible vitesse, et peu bruyants. Leur capacité de réserve en énergie - chimique ou électrique - est réduite et leur propulsion doit donc être la plus efficace possible pour leur conserver une autonomie acceptable. "Toutes ces exigences pourraient être remplies par des engins à ailes battantes, qui seraient mêmes

capables d'effectuer un vol stationnaire", explique Agnès Luc-Bouhali, responsable du projet Remanta. Ce projet transdisciplinaire est destiné à compléter les connaissances scientifiques et techniques nécessaires pour construire de tels engins. Autre avantage  : en ressemblant ainsi à un oiseau, ces drones miniatures passeraient plus facilement inaperçus.

Les difficultés à surmonter sont nombreuses. Mécaniquement, tout d'abord. Il est très difficile de faire voler et de contrôler des engins à ailes battantes. Une des clés du succès pourrait être le bio-mimétisme : observer, comprendre et reproduire ce qui se passe dans la nature. Peu d'oiseaux font du vol stationnaire, et ceux qui y parviennent, comme le colibri, sont dotés d'ailes compliquées à imiter. Les insectes semblent un meilleur modèle : nombreux sont ceux qui effectuent du vol stationnaire avec des ailes plus simples. Malheureusement, tous battent des ailes très rapidement et sont très légers. La fabrication de systèmes similaires pour les microdrones risque donc de ne pas être simple.

Autre problème à résoudre : étudier les sillages et tourbillons créés par ces mouvements complexes des ailes. Seule une bonne compréhension de l'écoulement des masses d'air selon les battements des ailes permettra d'optimiser les mouvements et de minimiser les efforts subis par le microdrone. Or, cet écoulement est bien plus complexe que l'écoulement de l'air autour d'un engin fixe comme un avion. Pour mieux les comprendre, l'ONERA mène des simulations dans un tunnel hydrodynamique afin d'observer les tourbillons et autres turbulences qui se forment lors des battements des ailes.

Enfin, les microdrones devront être réalisés avec des matériaux particulièrement légers, et pourtant très résistants. Il est aussi nécessaire d'étudier les performances de l'actionneur des ailes, semblable à celui des insectes, qui devra être robuste et précis. L'ONERA prévoit de construire un prototype pour vérifier les performances de ce "thorax résonant". Quant au stockage de l'énergie et à son utilisation, plusieurs options sont à l'étude dans de nombreux laboratoires (notamment à l'ONERA), dont les micromachines thermiques, l'actionnement piézoélectrique ou mécanique...

"Toutes ces recherches ne peuvent pas être menées séparément, car le microdrone est tellement petit (il ne pèse que 50 grammes !) que toute modification d'une partie a des conséquences sur l'ensemble du dispositif", souligne Agnès Luc-Bouhali.

Chercheur solitaire, s'abstenir.

Modèle cinématique de thorax avec ailes battantes
Modèle cinématique de thorax avec ailes battantes

 

Cécile Michaut, journaliste scientifique.

 

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